Au XVIIIe siècle, dans les vastes étendues du Sahara marocain, vivait une jeune fille du nom de Khnata Bent Bakkar. Petite, elle jouait dans les dunes, mais ses pensées volaient plus haut que le sable chaud, aspirant à un avenir que nul ne pouvait deviner.
Issue de la puissante tribu des Mgharfa, Khnata avait ce regard qui trahissait un avenir exceptionnel. Son père, le chef Bakkar Ben Ali, la fit monter sur un cheval paré de broderies et de bijoux étincelants, marquant ainsi l’importance de l’instant. C’était le début d’un long périple vers Meknès, où elle serait offerte au sultan Moulay Ismaïl.
La femme visionnaire
La vie dans la ville impériale ne ressemblait à rien de ce qu’elle avait connu. Les palais éclatants, les jardins aux mille senteurs et les intrigues de la cour formaient un labyrinthe complexe où chaque sourire pouvait cacher une épée. Pourtant, dans ce monde de luxe et de dangers, Khnata ne se contenta pas de rester dans l’ombre. Avec une intelligence acérée et une curiosité insatiable, elle gravit les échelons du pouvoir avec une grâce redoutable. Rapidement, elle devint l’épouse du sultan, son alliée la plus stratégique, sa conseillère préférée et celle qui murmurait à l’oreille du Roi Guerrier.
La force discrète
Moulay Ismaïl trouva en elle un esprit brillant, capable de voir au-delà des batailles et comprendre la danse complexe de la politique. Elle occupa des postes inimaginables pour une femme de son temps, devenant même ministre. Chaque décision prise à la cour portait en filigrane la touche discrète mais décisive de Lalla Khnata. Elle naviguait dans les eaux tumultueuses du pouvoir comme un capitaine expérimenté, sachant quand hisser les voiles et quand rester à quai.
La régente déterminée
Lorsque Moulay Ismaïl s’éteignit en 1727, les complots commençaient à se tisser dans les couloirs. Dans ce tumulte, la silhouette de Lalla Khnata se dressa avec une détermination sans faille. Sans couronne ni sceptre, elle devint la régente de son fils Moulay Abdellah et durant près de vingt-cinq ans, elle maintint le royaume à flot, souvent dans l’ombre, mais toujours avec une main de fer sous un gant de velours.
La diplomate audacieuse
En 1729, Khnata entreprit une mission historique : elle se rendit à Tripoli, prenant la tête de la délégation marocaine. Drapée de son voile somptueux, elle chevauchait en tête, défiant toutes les conventions. Ce n’était pas seulement une femme en voyage diplomatique, c’était la première ambassadrice du Maroc, une pionnière dans un monde qui refusait de voir les femmes autrement que dans les alcôves du pouvoir. Là-bas, elle négocia avec une habileté remarquable, laissant sa marque à jamais dans les annales du pays.
La mémoire vive
Durant toutes ces années, Lalla Khnata se battit pour stabiliser le Maroc. Elle était comme une étoile guidant son peuple et son fils à travers les épreuves. À la cour, les conseillers se tournaient vers elle, dans les moments de doute, cherchant la sagesse de celle qui connaissait les rouages du pouvoir mieux que quiconque. Son règne, officieux mais puissant, fut une danse entre la tradition et l’audace, un jeu de stratégie maîtrisé avec une élégance rare.
En 1754, Lalla Khnata quitta ce monde, emportant avec elle les secrets de ses réussites et de ses luttes silencieuses. Mais son nom, gravé dans la mémoire collective, continue de résonner comme celui d’une femme extraordinaire. Elle avait gouverné sans jamais réclamer le trône, avait inspiré sans jamais chercher la gloire. Son histoire, celle d’une femme qui avait osé rêver autrement, reste un témoignage vibrant de ce que signifie vraiment briser les chaînes.
Lalla Khnata Bent Bakkar (1668 – 1754)
Mariée en 1678, Lalla Khnata accompagne Moulay Ismaïl dans une expédition saharienne contre son neveu rebelle, Moulay Ahmed ben Mehrez. Elle se distingue comme Première Ministre et Secrétaire de facto de Moulay Ismaïl, jouant un rôle clé dans les négociations diplomatiques, notamment lors de discussions de paix entre le Maroc et la Grande-Bretagne en 1721. Après la mort du sultan en 1727, elle soutient son fils Moulay Abdallah dans les luttes de succession et exerce une grande influence sur son gouvernement, devenant même ministre des Affaires étrangères — la première femme à occuper une telle position au Maroc. Elle est également reconnue pour ses talents littéraires, ayant écrit des commentaires sur des ouvrages religieux et adressé des lettres aux habitants d’Oujda. Lalla Khnata est enterrée à la Nécropole Royale de la mosquée Moulay Abdallah à Fès el-Jdid, et son héritage perdure, notamment avec un lycée à Casablanca portant son nom.
Khadija Dinia, aka Didije est une journaliste influenceuse qui jongle entre papier et digital, en s’inscrivant aux tendances du moment. Elle met sa plume, son regard et son coeur au service du beau, valorisant tout type de contenu.
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